Famine à Madagascar : les conséquences du manque d’eau

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Elle ne fait pas la une des journaux et pourtant la situation de l’île de Madagascar devrait nous alarmer par sa gravité et nous inciter à agir maintenant, sans tergiversation, ni date butoir lointaine. Il en va de la sauvegarde de la planète et de ses habitants. En effet, les Malgaches subissent une famine qui devrait émouvoir même les plus endurcis et les plus climato-sceptiques. Car la grave crise alimentaire qui touche le sud du pays est la conséquence directe du réchauffement climatique et du manque d’accès à l’eau. 

La famine qui sévit à Madagascar est la terrible illustration de notre indifférence et de l’évolution dramatique du climat, situation qui va progressivement se généraliser si nous n’agissons pas de manière globale et efficace.  

Etat des lieux : une crise humanitaire sans précédent

Madagascar a déjà connu plusieurs crises alimentaires par le passé, mais celle-ci est particulièrement dramatique et les organisations internationales comme l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ou le Programme Alimentaire Mondial (PAM) ont informé la communauté internationale que près d’un million et demi de personnes se trouvaient dans une situation d’insécurité alimentaire grave. L’UNICEF a précisé que 500 000 enfants de moins de cinq ans vont souffrir de malnutrition ce qui aura des conséquences irréversibles sur leur développement et s’avèrera mortelle pour certains. On constate déjà des dizaines de décès dans les villages même s’il n’y a pas d’ estimation précise pour l’instant. Madagascar est le premier pays à expérimenter la faim due au réchauffement de la planète dénonce David Beasley, dirigeant du Programme Alimentaire Mondial.

Les habitants du sud de l’île et particulièrement ceux de la région d’Androy en sont réduits à se nourrir d’argile, de lanières de cuir ou de cactus qui les rendent malades. L’augmentation du prix des produits de première nécessité qui manquent cruellement contraignent les habitants à vendre leurs biens.

Une grande sécheresse qui anéantit les récoltes

En effet, les récoltes ont été catastrophiques suite à une grande sécheresse, la plus importante depuis quarante ans. Les conséquences de la sécheresse sur l’agriculture sont déterminantes puisque sans eau rien ne pousse, rien ne peut être planté en raison de la dureté des sols. Et des tempêtes de sable ont aggravé la situation en desséchant les champs et en polluant les sources d’eau. 

Les sources d’eau commencent d’ailleurs à se tarir et un rationnement drastique en eau est mis en place pour gérer la situation.

Plusieurs facteurs sont responsables de la sécheresse et du manque d’eau qui en résulte. 

Le manque d’eau lié à la déforestation

La déforestation de l’île est un problème majeur puisque celle que l’on surnommait l’île verte a perdu 90 % de sa forêt originelle. À Madagascar, les causes de la déforestation sont nombreuses. Le tavy en est un exemple: il s’agit d’une technique de cultures d’abattis-brûlis de la forêt.

Or, on sait qu’avec la déforestation, il y a moins d’évapotranspiration et donc moins de nuages, et par conséquent moins de précipitations. 

Avec le dérèglement climatique, les tempêtes se multiplient et aggravent le phénomène d’aridité, notamment dans les champs, et les épisodes de sécheresse durent plus longtemps.

Alors comment résoudre les problèmes liés au manque d’eau?

Reboiser pour protéger les écosystèmes et limiter le stress hydrique

La lutte contre la pauvreté passe par l’arrêt de la déforestation. Outre l’implication des communautés locales, la Banque Mondiale a lancé des projets d’agriculture durable en rémunérant les efforts de réduction des émissions de carbone provenant de la déforestation. Elle a notamment mis en place un contrat de vente de crédit carbone. Un autre programme de la Banque Mondiale consiste à réduire la dégradation des sols et à mieux gérer les ressources hydriques . 

Le reboisement est aussi un aspect essentiel, et plusieurs opérations de reboisement sont en cours à l’instigation des Malgaches mais aussi d’ONG.  

La mise en place d’infrastructures pour accéder à l’eau 

L’eau conditionne la vie des malgaches. Il est donc important de développer certaines infrastructures et notamment des stations de dessalement les long des littoraux. Il faudrait aussi créer des puits de forage en étant attentif toutefois à ne pas assécher les nappes phréatiques. 

Utiliser des techniques agricoles performantes et économes en eau

Il faut notamment recourir aux cultures résistantes à la sécheresse. Les semences améliorées sont de plus en plus utilisées. La technique de la reviviscence se révèle aussi très prometteuse (cf notre article Nourrir une planète qui manque d’eau, le défi de la reviviscence). La lutte contre l’érosion éolienne est un paramètre à traiter également. 

Limiter les émissions de gaz à effet de serre

Enfin, notons que ce sont les pays industrialisés qui émettent le plus de gaz à effet de serre. Pourtant les pays les moins industrialisés et dont l’empreinte carbone est la plus faible sont aujourd’hui les premières victimes du changement climatique et du manque d’eau. Il est donc impératif que les nations industrialisées mettent en place des mesures immédiates pour garantir la sécurité alimentaire dans le monde, celle-ci étant indéfectiblement liée à la disponibilité de l’eau. L’accès à l’eau est d’ailleurs un droit fondamental reconnu par l’ONU (cf notre article Les réserves d’eau potable dans le monde: problèmes et solutions envisageables).

Jusqu’à présent, l’aide des ONG est un palliatif indispensable pour sauver des vies et soulager un peu les habitants. Mais ce n’est pas une solution durable, seule l’implication  de l’Etat malgache et des nations industrialisées permettront d’enrayer ces crises qui sont appelées à se généraliser dans les mois et années à venir si aucune action de grande envergure n’est mise en place dès à présent.

 

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