New York : une gestion de l’eau qui réconcilie économie et écologie

New York

New York est un modèle à l’échelle mondiale pour sa gestion de l’eau. On peut boire à New York une eau d’une grande qualité pour un coût dérisoire. Dès le XIXème siècle, la Ville de New York a cherché une eau de qualité et l’a gérée de manière responsable. Plus tard, un dialogue et une concertation instaurés entre différents organismes et administrations ont conduit à la mise en place d’un système de gestion de l’eau toujours plus performant qui concilie et réconcilie économie et écologie. Le réseau d’eau de New York approvisionne actuellement huit millions de personnes et achemine 3,8 milliards de litres d’eau par jour.

Alors quels sont les fondements de cette réussite ? Quelles leçons tirer de cet exemple ? Comment peut-on appliquer ce modèle à d’autres métropoles ?

Une gestion de l’eau exemplaire

Au départ, les habitants de New York collectaient l’eau de façon rudimentaire à partir de puits ou de réservoirs d’eau de pluie. Mais la croissance rapide de la population a conduit à l’édification d’aqueducs qui acheminaient l’eau à New York depuis les montagnes Catskills, situées à 150 km de New York, pour trouver une eau pure. Les aqueducs Catskill et Delaware, situés à l’est de l’Hudson, approvisionnent ainsi la ville à hauteur de 90 % tandis que l’aqueduc Croton, alimente la ville à hauteur de 10 %.

Les trois systèmes de réservoirs, d’une capacité globale de 2,2 milliards de mètres cube, sont interconnectés, ce qui leur confère flexibilité́ et fiabilité́ afin de prélever une eau de la meilleure qualité́ possible. Et la qualité de l’eau est vraiment excellente, notamment parce que la forêt occupe les trois quarts de la surface des bassins versants des Catskills et du Delaware.

L’agriculture, une menace pour la qualité de l’eau

Toutefois, il y a quelques décennies, la pureté de l’eau des Catskills s’est trouvée menacée par l’usage croissant d’engrais par les agriculteurs qui souhaitaient industrialiser leurs pratiques agricoles pour survivre. Ils vendaient aussi les parties boisées de leurs exploitations à des promoteurs immobiliers avec des conséquences très néfastes d’un point de vue environnemental.

Des partenariats novateurs avec les agriculteurs pour réconcilier économie et écologie

Albert F. Appleton, ancien administrateur de New York City Water and Sewer et ancien commissionnaire du New York City Department of Environmental Protection, a mis en œuvre un programme global pour résoudre cette crise.

Il est parti du constat qu’il valait mieux investir pour préserver la qualité de l’eau des Catskills plutôt que de dépenser plusieurs milliards dans des infrastructures qui traiteraient une eau polluée. En bref, il a considéré qu’il fallait régler le problème à la source.

Ceci passait nécessairement par un accord avec les agriculteurs. Il s’agissait de trouver un terrain d’entente qui permettrait à la ville d’investir pour l’environnement en achetant des terres nécessaires à la gestion du bassin, et aussi de résoudre les problèmes de pollution liés à l’agriculture.

Les agriculteurs ont rapidement perçu l’intérêt d’un partenariat avec la ville et ont créé un programme de « planification agricole intégrale », en concertation avec la ville de New York, qui mettait en œuvre une politique de contrôle de la pollution adaptée à chaque exploitation. Après validation par le Conseil agricole du bassin versant, institution locale créée pour gérer le programme « Catskill Farm », la ville payait les investissements nécessaires à la mise en œuvre du plan et versait une allocation annuelle à l’exploitant. Ce plan permettait donc à la fois de préserver la qualité de l’eau et de rétablir une agriculture viable dans la région. Une alliance réussie entre écologie et économie.

Une communication efficace auprès des consommateurs

La Direction de la protection de l’environnement a aussi utilisé les technologies de l’information pour communiquer avec le public et l’inciter à économiser l’eau. 

La relève automatique des compteurs facilite le repérage de fuites et permet d’alerter les clients. Ainsi depuis 2011, plus de 96 000 notifications de fuites d’eau ont permis d’économiser plus de 80 millions de dollars.

L’intégration des changements climatiques pour améliorer la gestion des infrastructures

New York exploite un vaste réseau de distribution d’eau qui sera de plus en plus exposé aux conséquences du changement climatique. Le risque lié au changement climatique pour l’alimentation en eau de la ville réside dans le ruissellement généré́ par les fortes pluies qui a une incidence sur la qualité de l’eau contenue dans les réservoirs, tandis que les usines de traitement des eaux usées doivent faire face au risque d’inondation des équipements.

Même si les installations sont flexibles et permettent à la ville de distribuer une grande quantité́ d’eau provenant de sources de qualité́ quelles que soient les conditions climatiques, la Direction de la protection de l’environnement imagine de nouvelles solutions pour gérer les phénomènes météorologiques extrêmes, comme la mise en place d’infrastructures vertes ou la protection des installations critiques contre les inondations.

La ville a installé des réseaux d’égouts et d’eaux pluviales séparatifs notamment pour mieux gérer les périodes de fortes pluies. Enfin, il y a une vingtaine d’années, la Direction pour la Protection de l’Environnement s’est engagée dans la préservation des corridors d’écoulement naturels, également appelés « Trame bleue »: afin de réduire le ruissellement des eaux pluviales,

les infrastructures vertes se servent des plantes ou des sols perméables.

Des résultats probants

D’une part le taux de pollution agricole a diminué de 80 %, et la qualité de l’eau a été encore améliorée. Le coût du programme « Catskill Farm » a été amorti plusieurs fois grâce aux économies considérables qu’il a permis de réaliser et le prix de l’eau n’a pas augmenté.

D’autre part, grâce à une politique de sensibilisation et d’incitation, la demande en eau a baissé́ de plus de 30 % depuis les années 1990. Une loi fédérale, l’Energy Policy Act, relayée par des lois au niveau de chaque Etat pour une utilisation rationnelle de l’eau (par exemple l’interdiction de vendre des appareils sanitaires à haute pression) a porté ses fruits : la demande en eau à New York est désormais inférieure à 3,8 milliards de litres par jour. Ce volume, le plus bas depuis 60 ans, ne cesse de baisser.

New York, un modèle pour les métropoles du monde entier

L’interdépendance de l’économie et de l’écologie est le fondement du développement durable. C’est pourquoi la réussite du programme en concertation avec les agriculteurs a suscité un intérêt pour des solutions novatrices et écologiques bien au-delà de l’Etat de New York.

F Appleton rappelle que « Les programmes de rémunération des services écologiques comme celui de New York sont un moyen de consolider les gains environnementaux générés par ces services, puis de les réinjecter dans les milieux et communautés rurales. Cette situation permet de créer un cycle vertueux de soutien économique mutuel ainsi que d’investissements écologiques entre les zones urbaines et rurales, assurant un avenir plus durable pour ces dernières ».

En définitive, pour pérenniser les ressources naturelles vitales pour l’homme, il est essentiel de préserver les écosystèmes. Ceci est tout à fait possible en faisant le choix de développer les services écologiques au lieu de préférer la construction d’infrastructures industrielles coûteuses.

Isabelle Gheleyns-Guedj

Sources:

eau-iledefrance.fr: L’eau de New York

eaumega.org: Gestion durable de l’eau pour les New-yorkais et l’environnement

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